Mark Foster, chef d’orchestre, pianiste et compositeur vit depuis 25 ans à Cimiez, partageant ses activités entre l’auditorium du Musée Chagall où il dirige l’ensemble Apostrophe, le Conservatoire, L’Opéra de Nice et le CIRM avec lequel il participe régulièrement au Festival MANCA.
Ses brillants états de services pourraient laisser supposer que Mark Foster est de ces grands maestros inabordables. Il n’en est rien. Au fil de la conversation, apparait un homme affable, passionné, sensible, ouvert, curieux, atypique. Et la fibre du compositeur prend vite le pas sur celle du chef qui dirige à la baguette. Il l’avoue lui même « Je suis venu à la direction par la composition, je n’avais jamais envisagé de faire ce métier ».
Né à Melbourne il y a 57 ans, Mark Foster y fera ses classes de piano et de composition avant de rejoindre Munich où il se perfectionne et se prend de passion pour l’orchestration. « Quand je compose, je peux écrire pour un quatuor à cordes mais ce qui m’a toujours intéressé c’est la combinaison de la musique avec d’autres disciplines. J’avais ce besoin viscéral de m’exprimer à travers une musique qui prenne corps avec un autre vecteur » Mark profite des liens étroits entre le Conservatoire de Munich et l’école de cinéma bavaroise, l’équivalent de la FEMIS, pour rencontrer des apprentis réalisateurs « j’ai pu composer pour des films d’études mais aussi collaborer avec un compositeur pour orchestrer des Bandes originales et me suis rapproché de la Bavaria production. En ayant mes premières expériences comme chef d’orchestre pour le cinéma, j’ai appris l’efficacité. C’était fascinant et formateur ! ».
En 1980, Mark Foster devient assistant de direction à l’Opéra de Berlin puis assistant de direction d’orchestre à Zürich, Berlin et Lyon. C’est ainsi qu’il collabore avec Daniel Barenboïm puis Emmanuel Krivine et fonde en 1985 à Lyon, l’Ensemble Forum qui s’attache aux musiques du XXème siècle. Vite repéré, il dirige des formations prestigieuses en Europe comme les orchestres de la RAI de Turin, Milan, le Radio Sinfonie de Berlin, le Collegium Musicum de Zürich, l’Orchestre Symphonique du Westdeutscher Rundfunk de Cologne, etc… En France, il conduit les Orchestres nationaux de Lille, Bordeaux, Lyon ainsi que les Philharmoniques de Nice, Monte-Carlo, et l’Orchestre Régional de Cannes. Nommé Premier chef invité et consultant à la Villa Médicis à Rome en novembre 1997, Mark Foster a été directeur musical de l’Orchestre des Pays de Savoie de 1993 à 2003 puis chef invité de l’Orchestre de Caen de 2000 à 2009. Un agenda chargé, qui le contraint à mettre en sommeil sa passion pour la composition.
Suite à son mariage Il s’installe à Nice « Ma femme native de Nice ayant accouché voulait se rapprocher de sa mère. Comme j’étais souvent invité ici, nous avons choisi d’habiter à Cimiez ». Il y vit depuis plus de 25 ans « J’adore cette campagne perchée, à deux pas de la ville. Et puis je suis proche du Conservatoire et du Musée Chagall ». Car c’est dans l’auditorium de ce Musée qu’il partage son autre passion « Dés son arrivé en 2001 à la direction du Philharmonique de Nice, Marco Guidarini a créé l’ensemble Apostrophe pour défendre le répertoire contemporain. Il m’a confié la direction musicale de l’ensemble en résidence au Musée. C’est un pur bonheur né d’une osmose entre le CIRM qui œuvre en partenariat avec le Philarmonique de Nice et le Musée Chagall. Je m’entends merveilleusement avec Anne Dopffer directrice des Musées Nationaux des AM comme avec son prédécesseur Maurice Fréchuret. » Souligne celui qui donna un concert pour l’inauguration de l’exposition actuelle « Marc Chagall et la musique » puis deux autres concerts Apostrophe : « Mon plus grand plaisir fut créer en avril pour la première fois en France l’œuvre de Mauricio Sotelo, compositeur espagnol qui fait la synthèse entre le flamenco et la musique contemporaine. J’ai été séduit par l’accueil chaleureux du public venu en nombre. Les fidèles étaient là mais aussi des gens très différents. J’adore cet auditorium imaginé par Chagall qui draine une belle diversité de publics : des étudiants, retraités, notables en activité, touristes etc…». Une récompense pour ce musicien Chevalier des Arts et Lettres qui, riche d’une culture protéiforme prône l’éclectisme et les passerelles (il avoue écouter aussi du rock, de la pop, du jazz etc.) « L’ensemble Apostrophe est à géométrie variable. Les compositeurs contemporains ayant exploré avec délice des combinaisons insolites d’instruments, de la harpe à l’électronique. Il a été reconduit par Philipe Auguin. Une chance pour les niçois ! Il faut que ce projet perdure faute de voir la musique se scléroser. Je n’ai rien contre Brahms ou Beethoven mais il y a tant de belles œuvres produites depuis la mort de Mozart ou de Bartok, mes compositeurs favoris. Dans la cinquième grande ville de France on ne peut pas faire l’impasse sur ces 50 dernières années de création. »
Cet esprit d’ouverture anime également Mark Foster lorsqu’il compose. Tout jeune il s’est nourri d’expériences musicales. Son père dirigeait un chœur d’église à Melbourne, Mark l’accompagnait à l’orgue. Il s’occupait aussi d’une société dédiée à la comédie musicale et composait. Un virus transmît à son fils ? « Je vis actuellement une intense période de création et de bonheur autour de l’écriture de deux comédies musicales. » « Marlowe & Marlowe » d’après un livret et une musique qu’il signe narre la rencontre imaginaire du dramaturge de l’ère élisabéthaine mort assassiné avec le célèbre privé né sous la plume de Raymond Chandler : « La lecture est mon autre passion avec le jeu d’échec. Je lis de tout, dans cinq langues mais j’ai une vénération pour les romans noirs de Chandler que je tiens pour le plus grand écrivain américain. Je garde religieusement ses œuvres complètes en deux tomes, comme la bible ! (Rires) »
Ses compositions ont déjà été jouées au CNRR au Musée Chagall, et quand on parle de ses projets le chef mise sur le compositeur : « je coécris également une comédie musicale en français, avec un autre compositeur : Gérard Ramos. J’espère que l’une de ces créations sera montée à Nice. J’en serais très honoré. Quand je fais le bilan de mon parcours, c’est ici où j’ai le plus vécu… et ce n’est pas fini ! »