André Peyrègne a pris ses fonctions de directeur au Conservatoire en 1980 à la Villa Paradisio. 23 ans plus tard il est toujours à la tête du CNRR qui s’est déplacé en 2006 sur les hauteurs de Cimiez pour former les virtuoses de demain. Il revient sur sa carrière et sur celle de cette colline historique. Deux ascensions musicales intimement liées.
Dans les années 80, la Villa Paradisio était en plein essor sous l’impulsion de Pierre Cochereau, un organiste de réputation internationale qui exerça aux grandes orgues de la cathédrale Notre-Dame dans les années 60, et qui en fit en 1968 un conservatoire national, puis national de région.
« C’est dans ces années-là que j’y fut moi même élève. J’ai étudié avec d’éminents professeurs que plus tard je fut appelé à diriger » Mais la villa de charme à l’orée du boulevard du Cimiez devint vite trop petite face au succès de l’établissement. « On y dispensait des cours dans les caves et même dans les communs. Je me souviens d’un inspecteur alors que j’étais jeune directeur qui tout en me disant je dois m’absenter prenait la direction des toilettes « Non pas là, il y a un cours de percussions ! » je m’empressais de lui signaler.
Créé en 1916 Le conservatoire, avant d’intégrer à la fin des années quarante la Villa Paradisio, fut abrité à la Villa Thiole dés les années trente « Ce que l’on sait moins c’est que pendant la guerre la Villa Paradisio servie d’annexe à la Villa Médicis. Le peintre Fontana Rosa et le compositeur Henri Dutilleux y firent leur séjour romain ».
Le conservatoire ne pouvait trouver pour s’établir meilleur écrin pour s ‘épanouir que la colline de Cimiez qui dés le 19 éme siècle s’était déjà mise au diapason : « Deux comtesses venues du froid y ouvrirent leur salon de musique au temps de la première villégiature aristocratique. Eliza Branicka, grande amatrice de Wagner, et versant Est, l’amie intime de Chopin, Delfina Potocka. » La première habitait sur le terrain où fut bâti le Musée Chagall, la seconde à l’emplacement du Lycée Stanislas. Au milieu du 19 éme siècle le boulevard de Cimiez n’était pas construit. Il le fut par Henri Germain (fondateur du Crédit Lyonnais) dont l’épouse mécène tenait elle aussi son salon de musique au Parc Orangini. On ne saurait oublier le château Valrose. Une autre résidence emblématique édifiée par le constructeur du Transsibérien, « Ce mélomane richissime y entretenait lui à demeure un orchestre complet qui remplaçait avantageusement le phonographe »
La source ne devait pas se tarir, le Musée Chagall accueillant dans les années 70 de prestigieux virtuoses dans son auditorium « J’ai pu assister à des concerts de Rostropovitch aux cotés de Marc Chagall et d’Olivier Messiaen ». A la même époque et avant d’être reconverties au jazz, les arènes accueillirent les grandes rencontres d’art lyrique. « Les concerts du cloitre » qui vont vers leur soixantième année appartiennent eux aussi au patrimoine musical de la colline. « L’événement est né alors que l’académie de Nice était la seule d’été en Europe avec Salzbourg. Les plus grands musiciens du monde sont venus enseigner ici »
Au fil du temps la musique s’est démocratisée, défrichant d’autres partitions. « Nous fumes les premiers à ouvrir nos classes au jazz puis aux musiques actuelles. C’est aussi pour ces raisons que nous avons du voir plus grand en 2006 » explique le directeur du CNRR, qui à sa manière participa à cette évolution « J’avais monté dans les années 80 un orchestre de chambre qui m’a permis d’accompagner des musiciens extraordinaires dont Stéphane Grappelli. Cela reste un grand souvenir que le Conservatoire perpétue puisque nous accueillons certains concerts de la salle Grappelli, nos voisins, comme l’an dernier celui de John McLaughlin. Nous avons également des ouvertures sur la musique actuelle. Par l’intermédiaire des artistes nés au début du siècle et que j’ai connu dans les années 70 j’ai eu la chance de vivre le parcours musical de Cimiez sur deux siècles. Et ce n’est pas finit, car l’aventure continue ! »