L’histoire des hivernants britanniques à Nice débute dès la fin du XVIIIe siècle, favorisée par les relations étroites entre la couronne d’Angleterre et la Maison de Savoie. L’attrait du climat méditerranéen, vanté notamment par l’écossais T.-G. Smollett en 1765 « Je m’enrhume bien moins facilement à Nice… », attire de nombreux Anglais, surtout après l’annexion de Nice à la France en 1860. Cette fidélité britannique est consacrée par les séjours répétés de la reine Victoria entre 1895 et 1899, faisant de la ville un haut lieu de villégiature aristocratique à la Belle Époque.
L’arrivée de la reine Victoria à Nice en 1895
La reine Victoria effectue son premier séjour niçois en 1895, logeant à l’hôtel Vitali, annexe du Grand-Hôtel de Cimiez (aujourd’hui hôpital de Cimiez). Séduite par la ville, elle y revient à quatre reprises. Son imposante suite d’une cinquantaine de personnes incite une société parisienne à financer la construction d’un hôtel à la hauteur de son prestige : l’Excelsior Régina Palace, conçu par l’architecte Sébastien-Marcel Biasini.
Avec ses cinq étages et ses 150 mètres de façade, ce palace devient un emblème du quartier de Cimiez. L’aile ouest, la mieux exposée, est spécialement aménagée pour la reine, symbolisée par la couronne ornant la coupole. Avec sa suite, elle dispose de soixante-dix pièces (il y a deux cents chambres dans le palace). Ses appartements sont au premier étage. Il y a les pièces d’apparat comme le grand salon et des pièces plus intimes comme la chambre tapissée de soie rose avec un lit d’acajou, très bas, à baldaquin.
Le Régina Palace : un palace à la hauteur d’une souveraine
Cependant, en raison de travaux inachevés, la reine Victoria séjourne à nouveau au Grand-Hôtel en 1896 avant d’inaugurer le Régina en 1897. Elle voyage en train spécial, accompagnée de sa fille Béatrice de Battenberg, et s’installe dans des appartements somptueusement aménagés, avec des meubles envoyés depuis les résidences royales britanniques.
Les explorations de la reine au-delà de Cimiez
La Reine Victoria ne se contente pas de rester à Cimiez : elle explore les collines niçoises et visite des villages alentour, malgré son âge et un léger rhumatisme. Elle fréquente des auberges locales, comme Le Thé de la Reine à Falicon, où elle aurait dégusté du vin de Bellet. Soucieuse du bien-être des chevaux, elle fait installer des abreuvoirs sur les routes escarpées.
Elle rend visite aux souverains européens présents sur la Côte d’Azur : sa petite-fille Marie, future reine de Roumanie, au château de Fabron, ou l’impératrice douairière de Russie, Maria Feodorovna, à Cap d’Ail.
Chaque année, elle se rend en train au Cap Martin pour voir l’impératrice Eugénie, veuve de Napoléon III. Elle s’intéresse également à la culture niçoise : elle admire les ex-voto de Laghet, observe les Pénitents Rouges lors du Jeudi Saint au cours Saleya, et assiste au festin des Cougourdons au monastère de Cimiez. En 1895, elle assiste depuis son landau à la célèbre bataille de fleurs et reçoit en souvenir une bannière de satin rose.
La reine quitte Nice en 1899, laissant un souvenir impérissable. Avant son départ, elle distribue des cadeaux à plus de 100 personnes, du préfet aux gendarmes, sans jamais commettre d’erreur dans les attributions.
Quelques heures avant sa mort, le 22 janvier 1901, elle dira ces mots : » Ah ! si seulement j’étais à Nice, je guérirais « .
« Peu après, en hommage à son attachement à la ville, le Queen Victoria Memorial Hospital est inauguré sur la Basse Corniche en 1906.
En 1912, un monument en son honneur est érigé devant le Régina par le sculpteur Louis Maubert, sur un socle conçu par Sébastien-Marcel Biasini.
Ainsi, dans la mémoire niçoise, la reine Victoria dispose d’une place enviable, celle d’une souveraine aimable et appréciée des Niçois, dont le passage nous a légués de magnifiques monuments.